“Nous avons un pape” (“Habemus Papam”)

La dépression et la santé mentale sont malheureusement des sujets tabous. Par contre, le cinéma me démontre qu’il n’a pas peur de toucher ce sujet de plus en plus. Souvent amenée de façon subtile, les films se concentrant sur une étude de personnalité que j’ai visionné dans la dernière année touchent tous la dépression et la santé mentale. Que ce soit les films indépendants “Take Shelter” ou “Shame”, et maintenant la comédie dramatique italienne “Nous avons un pape”; tous touchent la santé mentale de façon très différente.

Présenté en compétition officielle lors du Festival de Cannes de 2011, “Nous avons un pape” commence avec le processus d’élection pontifical suite au décès du pape en fonction. Ayant de la difficulté à choisir le nouveau pape, plusieurs tours de scrutins étant requis, le Cardinal Melville est élu. Épris d’anxiété, le nouveau Pape est incapable d’assumer ses fonctions. Il se retire d’abord dans ses appartements privés, pour ensuite être consulté par deux psychanalystes et trouver le moyen de s’évader de la structure rigide qu’il lui est dorénavant imposé en s’échappant du Vatican. Durant ce périple, le nouveau Pape trouve le temps pour se questionner et évaluer sa situation en vivant comme le commun des mortels.
 
Ce film est beaucoup plus “drame” que “comédie”. Le nouveau Pape (Michel Piccoli) est pris au désarroi; il se sent mal de causer autant de trouble, mais il est “incapable de faire quoi que ce soit”, telle est la phrase qu’il répète tout au long du film. Lorsqu’il s’évade du Vatican, nous avons le plaisir de le voir se redécouvrir. En disant très peu de mots, nous voyons un épanouissement dans son visage lorsqu’il redécouvre le théâtre, un milieu dans lequel il aurait préféré faire sa vie. Nous voyons aussi une tension qui se dissipe lorsque le Pape part à la découverte de la ville de Rome, se promenant dans cafés, boulangeries et magasins. Je suis toujours impressionnée par les prestations peu verbales; il faut un talent fou pour convaincre un auditoire des émotions de son personnage uniquement par son non-verbal. Michel Piccoli, à 86 ans rien de moins, brille dans sa conviction en tant que Pape déprimé et en quête de soi. 

Le Pape (Michel Piccoli)

Les éléments qualifiant aussi le film de “comédie” se retrouvent à travers le premier psychanalyste embauché pour aider le nouveau Pape, interprété par Nanni Moretti, réalisateur du film. Une fois que le Pape disparaît, le psychanalyste et le reste du conclave demeurent prisonniers au Vatican car les règlements stipulent que tant et aussi longtemps que le Pape n’a pas été annoncé au public, le conclave doit demeurer à l’intérieur du Vatican. Conséquemment, les jeux de cartes et les discussions philosophiques se multiplient. Le personnage du psychanalyste est un peu nos yeux dans tout ceci, il est un personnage externe donc sa naïveté face à l’infrastructure papale sert à nous expliquer ce qui se passe. J’ai apprécié son énergie et son enthousiasme à mieux faire passer le temps car les cardinaux ne semblaient pas trop savoir quoi faire. J’eus l’impression qu’ils sont tellement habitués de se faire guider et coordonner, qu’ils étaient pris au dépourvu avec tout ce temps libre sans contact extérieur. Le psychanalyse eut la brillante idée d’organiser un tournoi de volleyball. C’était hilarant de voir les cardinaux en soutane noire jouer au volleyball et s’enthousiasmer lors de gains, mais aussi s’envenimer lors de pertes. Ces scènes plus légères, menées par le psychanalyste, se mariaient bien avec les scènes plus lourdes avec le Pape en questionnement. 

Le psychanalyste (Nanni Moretti) au début du tournoi de volleyball!

Nous ne saurons trop ce qui créé ce grand malaise chez le Pape. Ce n’est pas un film qui crie: “Il a la maladie d’Alzheimer! Il est confus! Il est déprimé!” Nous sommes plutôt invités à nous faire notre propre opinion, ce qui est correct ainsi. Après quelques jours de réflexion, je me rends compte que c’est une des choses que j’aime le plus du film. Le personnage du Pape vit son questionnement de façon lente et introspective, je ne crois pas que son malaise aurait pu être montré autrement. J’ai apprécié la tournure des événements anti-hollywoodienne; ce n’est pas parce que le Pape prend plusieurs jours pour décider s’il veut ou non être Pape qu’il prend la décision qu’on espère de lui…

Même si le film n’a pas été tourné au Vatican, le réalisateur Nanni Moretti n’ayant pas eu la permission, nous avons tout de même le privilège de découvrir ses dessous organisationnels en une reconstitution des lieux. Que ce soit la façon de procéder pour élire un nouveau pape, les procédures gouvernant le travail de Pape, les différentes personnes travaillant au Vatican, les nombreuses pièces officielles, les différents départements s’y trouvant, etc., c’était extrêmement intéressant de voir le (faux) intérieur de cet immeuble et ce monde. J’ai bien aimé avoir un oeil parmi ces lieux, même si ce n’était qu’une reconstitution.

LE MOT DE LA FIN: Une comédie dramatique intelligente, qui est très bien montée, mais qui manque une certaine passion derrière qui ferait en sorte que je donnerais une cote plus élevée. Je ne sais pas pourquoi c’est le cas, peut-être que je m’attendais davantage à une comédie qu’un drame, peut-être c’est parce que j’ai vu une version doublée en français. Reste que pour une fois je me sens mal de donner ce verdict: PETIT PRIX DU MARDI!
DERNIERS DÉTAILS: “Nous avons un pape” (2011) réalisé par Nanni Moretti, scénarisé par Nanni Moretti, Francesco Piccolo et Federica Pontremoli, mettant en vedette Michel Piccoli, Jerzy Stuhr, Nanni Moretti et Margherita Buy.

2 thoughts on ““Nous avons un pape” (“Habemus Papam”)

  1. AH voilà un film que j’aimerais voir! …Picolli 86 ans? que ferais-je à cet âge là :-S…ton billet en tout cas donne envie

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    • Mais nous étions supposés le voir ensemble mais tu ne pouvais plus ce soir-là 😦 Ça vaut la peine, mais peut-être que j’aurais plus aimé en version sous-titrée! À mettre sur ta liste FAV!! 😉

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